Pelouses brulées : Les opérations pour récupérer un gazon dense et vert
Publié le 20/11/24
A la sortie de cet été caniculaire, les pelouses sont en piteux état : intégralement jaunies pour la plupart, clairsemées, avec quelques taches vertes d’adventices. Mais le gazon devrait reverdir avec les pluies d’automne et retrouver son aspect initial si vous mettez en œuvre les bonnes opérations.
Cet été, les gazons ont été mis à rude épreuve. Ils ont en effet dû faire face à une sècheresse très longue (souvent débutée dès l’hiver) combinée à des chaleurs extrêmes depuis juin. Sans compter les restrictions d’arrosage qui ont touché cet été la plupart des départements français. Résultats : les pelouses sont grillées. Les brins d’herbe sont bruns et secs et le gazon semble mort. Mais rassurez-vous, il devrait s’en remettre.
La dormance ou quand le gazon se met en veille
C’est un phénomène normal appelé dormance, qui permet aux plantes de survivre aux saisons les plus défavorables. Si la dormance hivernale est la plus étudiée, il existe également une dormance estivale pour certaines plantes. Ainsi, lorsqu’elles sont soumises à un stress hydrique, les graminées tempérées pérennes arrêtent leur croissance et leurs parties aériennes se dessèchent progressivement. Par exemple, le ray-grass anglais ralentit sa croissance à partir de 20°C et ne pousse pratiquement plus au-delà des 25°C.
L’entrée en dormance, plus ou moins rapide selon les espèces, évite un épuisement de la plante. La dessication des feuilles permet de réduire fortement l’évapotranspiration. Les graminées de gazon manifestant les meilleures adaptations à la dormance sont, en l’absence de fortes chaleurs, les ray-grass/pâturin puis les fétuques rouges/ agrostides. En présence de températures élevées, le classement change, avec le cynodon en premier, puis les fétuques élevées, le pâturin et les ray-grass.
La survie de la plante est uniquement conditionnée par la survie du collet, où se trouvent les méristèmes du plateau de tallage. Les graminées peuvent ainsi survivre en dormance pendant 3 à 6 semaines suivant les espèces.
La rapidité de redémarrage lorsque les conditions deviennent plus favorables (fraîcheur et humidité) est variable selon les espèces. On trouve, par ordre décroissant, le cynodon, les fétuques élevées et les fétuques ovines, les ray-grass anglais, le pâturin des prés et les fétuques rouges traçantes, les agrostides, les fétuques rouges ½ traçantes, les fétuques rouges gazonnantes et enfin le pâturin commun. Les fétuques élevées et ovines, qui sont parmi les plus rapides, mettent ainsi entre 11 et 16 jours pour reverdir.
Comme les graminées en place sont très faibles (et même mortes pour certaines), les plantes indésirables ont tendance à occuper les espaces laissés libres et à se développer, que ce soit grâce à une meilleure résistance à la sècheresse (le pissenlit par exemple avec sa longue racine pivotante ou le panic pieds-de-coq) ou grâce à un stock de graines en dormance dans le sol (la spécialité du pâturin annuel). Il est donc important de s’occuper au plus vite du gazon pour ne pas se laisser déborder par les adventices.
Les étapes pour redonner de la vigueur au gazon
Pendant la période de dormance, le gazon est fragilisé. Il est donc important d’éviter au maximum de le piétiner tant qu’il n’a pas redémarré sa croissance. Il faut également éviter de l’affaiblir par une tonte trop précoce et/ou trop courte.
Reprendre l’arrosage dès que possible
La première chose à faire est de relancer l’arrosage dès la fin des restrictions. Il faut privilégier un arrosage en profondeur, en programmant 2 arrosages par semaine de 15 mm chacun, le matin ou le soir.
Lors des premiers arrosages, il faudra être vigilant au niveau d’absorption des sols. Ils sont particulièrement secs et vont mettre du temps à se réhumecter. Si vous apportez trop d’eau d’un coup, une grande part va être perdue par ruissellement.
Un apport d’engrais typé « rénovation » en septembre
Une fois le sol réhumidifié, il faudra prévoir un épandage d’un engrais à la fois riche en azote (N) pour relancer la croissance du gazon, mais surtout riche en phosphore (P) pour stimuler la croissance des racines. Un peu de potassium (K) permettra de renforcer le gazon afin d’éviter toute maladie opportuniste. Enfin, la présence de fer (Fe) ou de magnésium (MgO) permet d’améliorer la photosynthèse et de redonner une belle couleur verte au gazon.
Pour plus d’efficacité, vous pouvez combiner la pulvérisation d’un biostimulant liquide à base d’algues, d’acides humiques… pour une action rapide et ciblée (anti-stress, système racinaire…) à l’épandage d’un engrais granulé classique, à l’action plus progressive et soutenue.
La reprise de la tonte
La règle de base est ne pas tondre plus d’1/3 de la hauteur totale de l’herbe à chaque passage de la tondeuse.
Éviter de tondre trop ras le gazon pour lui permettre de faire le maximum de réserves avant l’hiver.
Un apport d’engrais d’automne en octobre-novembre
L’apport d’un engrais d’automne riche potassium K (par exemple, un ratio NPK 5.1.12) permet à la fois de nourrir le gazon et de le préparer à affronter les températures hivernales. Une formulation à libération lente est à privilégier pour protéger durablement le gazon.
Un regarnissage sans doute nécessaire
Malgré ces opérations, il est possible que la pelouse présente des zones clairsemées ou carrément mortes et que les adventices se soient fortement développées. Dans ce cas-là, il faudra prévoir un regarnissage afin de retrouver un gazon uniforme et dense, capable de lutter ainsi naturellement contre les indésirables. Mais il vaut mieux attendre que le gazon ait repris un peu de force car cette opération affaiblit momentanément les graminées.
Il faut d’abord réaliser une tonte rase à 3-4 cm.
Puis passer le scarificateur afin d’enlever le feutre et les feuilles d’herbe desséchées. Cette opération favorise aussi le tallage (et donc la couverture) du gazon en place. Veillez à ne pas travailler trop profond pour ne pas trop endommager les racines déjà fragilisées : régler les lames pour qu’elles pénètrent à 1 cm sous la surface du sol. Un passage croisé permet de bien nettoyer le gazon. Ramasser ensuite au maximum tous les brins et la mousse remontés, avant de passer au semis.
Terreauter sur 1 cm environ avec un substrat spécial gazon (matériau généralement assez fin, à la fois riche en sable, en matière organique et en engrais organique) et répartir le terreau sur l’ensemble de la surface avec un balai à gazon. Cette opération permet à la fois de supprimer les irrégularités de la surface, préparer le lit de semences et, par la même occasion, d’améliorer le sol (structure, teneur en matière organique, vie microbienne…). Il sera ainsi plus apte par la suite à assurer à la fois un bon drainage de l’eau (grâce au sable) tout en assurant une bonne rétention de l’eau (grâce à l’apport de matière organique).
Effectuer le regarnissage avec un mélange spécifique, prévu pour une installation rapide. Le dosage est habituellement de 15 à 25 gr/m² selon les mélanges. Rouler juste après le semis pour bien mettre les graines en contact du sol. L’apport d’un engrais riche en phosphore peut vous permettre d’accélérer la germination et la croissance des racines si le délai est un peu court avant les premières gelées.
Prévoir pour la suite un arrosage quotidien pendant environ 15 jours et la première tonte quand les nouvelles pousses mesurent 6 à 8 cm.
Quelques conseils pour l’année prochaine
Opter pour des espèces plus résistantes à la sècheresse
Étant donné l’augmentation de la fréquence des épisodes de sècheresse, il peut être intéressant de faire évoluer la composition des graminées du gazon en introduisant lors du regarnissage des espèces plus résistantes au stress hydrique.
C’est le cas notamment des fétuques élevées, fétuques ovines et fétuques rouges ½ traçantes. Ces graminées ont en revanche une vitesse d’installation plus lente que les ray-grass anglais fréquemment utilisés en regarnissage.
Vous pouvez aussi opter pour des espèces de climat chaud (plantes en C4), particulièrement résistantes à la sècheresse et aux fortes températures. On trouve dans cette liste le Cynodon dactylon, le Zoysia japonica, le Pennisetum clandestinum (plus connu sous le nom de « kikuyu »), le Paspalum vaginatum et le Koeleria macrantha. Il faut savoir en revanche que ces graminées ont tendance à jaunir en hiver. Il est donc préférable de les associer avec des graminées de climat tempéré.
Relever la hauteur de tonte l’été
En premier lieu, il faut savoir que la hauteur de tonte a un impact direct sur la longueur des racines. Plus le gazon est tondu haut, plus le système racinaire est profond et dense, rendant ainsi la graminée plus résistante à la sècheresse. Il est donc préférable de ne pas tondre son gazon trop ras : une hauteur de 5 à 7 cm est recommandée.
La hauteur de tonte doit en outre être relevée entre 8 et 10 cm durant les mois les plus chauds pour préserver au maximum l’humidité du sol et protéger les collets des graminées des rayons du soleil. De la même façon, il vaut mieux privilégier une tonte mulching : les fins brins d’herbe laissés au sol constituent une sorte de « paillage » naturel qui améliore la conservation de l’humidité dans le sol et enrichissent par la même occasion le gazon en se dégradant.
Pour aller plus loin :
- Plus d’informations sur la réponse des graminées au stress hydrique sur le site d’Ecoumene (Agref) : http://www.ecoumenegolf.org/BGazon/Stress%20hydrique%2015.PDF
- Article présentant les caractéristiques des principales graminées de gazon : https://www.e-spacevert.com/especes-de-graminees-de-gazon